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                                                                    LES FIGUES

 

 

 

Ma bonne-maman Rose, je l'ai dit, était presque infirme, avec ses membres gourds, son dos raide et ses pieds déformés. C'est cela qui explique l'attitude où je la revois lorsque, assise sur un tabouret en une partie inculte du jardin, elle allongeait obliquement ses jambes de part et d'autre d'un feu de souches à quatre pierres pour faire la confiture. 

    Là en effet est l'extraordinaire: cette vieille qui jouait les Canadairs avant la lettre, inopinément pour le peuple des fourmis arthropodes des allées, avec d'autres relents que ceux de l'essence, cette vieille magicienne percluse et malhabile était capable de fabriquer des merveilles, merveilles de goûts et de parfums.

    Tel était le fruit d'une longue expérience paysanne et parmi les odeurs mêlées qui vivaient en nappes sous les aîtres, qui s'étalaient en diffusant, rétrécissaient et puis mouraient, qui renaissaient et se croisaient, selon les courants d'air des portes, selon les heures du jour, selon les saisons et l'ordinaire des productions de la terre, parmi toutes, une particulièrement m'a ravi, que j'ai toujours présente à mes narines, c'est celle des figues cuisant dans le chaudron de cuivre rosé, si noir au-dehors.

    Bonne –maman surveillait sans touiller. Remuer les figues avec la grande cuillère de bois eût abîmé lo confiment, car les figues eussent éclaté et se fussent réduites en purée. Très tôt leur jus, lui-même sirupeux, atteignait, une fois mélangé au sucre blanc, une haute température. Les fruits gonflaient alors, et il fallait savoir conduire la combustion sous le ventre charbonneux du païrol. Penché autant que la chaleur le permettait à mes yeux humides, je regardais et je humais.  

    De plusieurs petits volcans ici et là entre les fruits, venue des profondeurs du mélange, une lave filante et bulbeuse s'écoulait avec un petit bruit d'éclosions gourmandes sans cesse renouvelées. La couleur, d'abord inexistante dans la transparence du sirop froid, fonçait puis caramélisait. Les fruits avaient gonflé en confisant, et la transformation des tissus végétaux rendait la fige transparente à son tour. Toutes les veines de sa peau délicate apparaissaient avec netteté pour entourer doucement un volume parfait, rond, en chair de figue confite, sucrée à point, qui remplirait idéalement la voûte du palais et le creux de la langue, le moment venu, avec délice:

 

Comme le fruit se fond en jouissance,

Comme en délice il change son absence

Dans une bouche où sa forme se meurt …

 

(Paul Valéry, Cimetière Marin)

 

 

    Quand, plusieurs années plus tard, lorsque je serai étudiant et qu’ il s'agira de récupérer d'un coup de fatigue, de me donner un moment de réconfort après des heures de travail, tard dans la nuit ou tôt dans la journée, je puiserai dans le pot de verre une figue confite. Saisie entre le pouce et l'index par l'extrémité dure de sa queue, dernier régal à croquer, et son ambre miré un instant à la hauteur de mes yeux, elle a toujours aussi rondement satisfait mon palais, toujours aussi aisément rempli son office délectable. Elle m'a aussi à chaque fois ramené aux heureuses années de mon enfance et j'ai revu la vieille breïcha affectionnée, ronde dans ses voiles noirs, devant un chaudron noir et rond, à peine plus volumineuse que lui, et je ne suis pas loin de penser qu'elle ressemblait elle même aussi, Rose, son visage rose émergeant de ses voiles noirs, et dorée par le reflet du cuivre comme le jus de la figue qu'elle savait si bien élaborer…

     Je revois ses longs doigts noueux cueillant les panses rebondies parfois fendues par l'air humide. Alors, la chair blanche et rosée apparaissait, convoitée des guêpes et des abeilles grondantes de colère. Comme elle, je sus bientôt guetter en signe de maturité la goutte miellée à l'orifice de la fleur. Savez-vous que la figue cueillie est encore une fleur, dont les fruits sont cachés en elle ? De cette fleur, vous ne verrez jamais les pétales. Étrange fleur, jamais éclose, sans attraits, sans pétales, sans couleurs, qu'un hyménoptère parasite du caprifiguier, le figuier sauvage des chèvres, sait lui seul féconder… Mais ce que je ne saurais jamais, c'est procéder à l'ultime opération de surveillance de la cuisson.

    L'air soudain devenu plus grave, vers la fin du temps voulu, qu'elle ne comptait jamais, elle élevait sa cuillère en léger contre-jour devant ses yeux, au-dessus d'une soucoupe. Il s'agissait d'éprouver comment le jus faisait la goutte. En fin de cuisson, la lave devenait plus visqueuse, les bulles avaient de la peine à percer. C'était le moment d'être attentive. La goutte devait tomber à peine, comme à regret, dans la soucoupe. Le feu arrêté trop tôt, la goutte tombant trop vite, la confiture se fût mal conservée; la goutte étudiée trop tard nous eût valu une confiture trop brune qui, après du temps, eût cristallisé désagréablement pour les dents.

 

    Jusque là, enfant gourmand peu soucieux des lendemains, j'attendais qu'elle eût fini son examen pour goûter, lécher, effacer de la soucoupe le jus encore tiède et faire craquer sous mes dents les minuscules grains, concentrés d'arôme, qui portaient encore l'âme évanescente de la figue.

 

 

 

                                      Henri B. Laboucarié

 

 

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José Pigeolet Pigeolet José - dans Métopes
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MA MERE-GRAND

 

 

   Elle s'avançait dans l'allée du jardin, s'arrêtait au bout de quelques pas. Là, un instant d'immobilité lui permettait d'accomplir une foule d'opération dont le bon déroulement assurait le succès d'une des tâches les plus graves de la journée. Légèrement campée – le camper des chevaux –, elle vérifiait l'équilibre de ses appuis, commandait à ses neurones une laborieuse obéissance, conduisait l'influx vers le centre de son individu, décontractait les sphincters et, brutalement, ouvrait en grand les vannes, tout debout, de façon altière, massive et radicale. Cela fait, elle opérait  un demi-tour de sa démarche déjà claudicante, presque sur la tranche de ses vieux pieds déformés, non sans avoir éclaboussé ses larges chaussons noirs.

 

   Telle qu'elle était, nouée de rhumatismes, quasi incontinente, malpropre, peut-être paresseuse par manière de laisser-aller et, de surcroît malveillante envers ma propre mère, elle était ma grand-mère, la seule que j'eusse, et je l'ai toujours considérée comme telle.

 

   Ajouterai-je que, enfant mâchuré au visage collant de miel ou de confiture, je me voyais régulièrement appliquer en débarbouillage sommaire son index recouvert d'un mouchoir, le sien, souvent défraîchi, qu'elle imbibait copieusement de sa salive… Demandait-on à l'Esprit Saint d'avoir goût suave et haleine fraîche dans sa sécrétion salivaire du prêtre qui sanctifiait jadis les lèvres du nouveau-né ? Poésie de l'horrible, peut-être, mais l'odeur et la saveur douceâtres de mon aïeule directe sont l'une des sensations fortes de mon jeune âge qui m'ont marqué à tout jamais, comme si la partie acquise des défauts familiaux, distinctement de la partie native, était aussi passée par elles, dans ce geste primitif, animal et tutélaire de la vielle penchée gémissante pour rapproprier sous la table ma frimousse d'enfant joueur.

 

                                                                                                                         Henri B. Laboucarié

 

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José Pigeolet Pigeolet José - dans métopes
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Communier avec l'instant du présent,

En se jetant dans la mer

À la rencontre de chaque vague, 

Et se laisser porter par elle

Emporté par le roulis monotone.

Et trouver l'éternité du moment. 

 

Un âge plus que canonique 

Pour se convaincre que l'avenir, 

C'est la réalité signifiante du présent.

Chaque moment de la vie est unique,

Il ne se répétera plus.

 

La réalité du présent

Coule à flots en un joli murmure, 

S'en va construire les châteaux,

A l'intérieur de moi,

Se balance au gré de ma pensée, 

Inonde le monde qui me baigne,

Rit sous le soleil

Et pleure des gouttes de silence 

Qui coule doucement.

 

Cette éternité de l'instant m'appartient.

Si je le veux vraiment

Je  pourrais en faire un paradis.

 

Ô joie infrangible

Que de retenir ou laisser filer

Dans la paume de la main, 

Les grains de sable

En nombre infini

Dans l'heure du présent.

 

Cueillir les raisins de la vigne du temps.

Les porter à la bouche

Pour les croquer délicatement,

Et savourer lentement

Le jus sucré et désaltérant

S'échappant de l'enveloppe

Qui emprisonne la chair

Gonflée de désirs dilapidés.

 

La vie exulte par ces infimes instants

Qui sont les "maintenant" 

 

À l'instant même où j'écris, les mots abondent

Et se déversent en un fleuve puissant.

Ces mots, il faut les capturer un à un,

Les comparer, les polir, les assembler,

Créer des phrases qui m'ancrent

Dans le maintenant de ma pensée

 

Oublier l'instant du mal

Et la projection dans l'avenir.

Être conscient de ce qui est sous mes yeux:

Le sourire de l'aimée, 

La pensée d'un ami,

L'éclat de rire d'un enfant, 

Un rai de lumière dans la chevelure blonde,

La source limpide qui désaltère,

Un oiseau qui chante, 

Le chat qui ronronne sous la caresse du soleil.

L'herbe sublimée par de ses humbles marguerites, 

Le jaune éclatant des jonquilles 

Perçant vaillamment la terre humide

Et annonçant la proche venue du printemps.

 

Permettre de voir les beautés et les merveilles 

Qui nous entourent et être heureux.

Chaque matin, chasser les moments déchirés

Et cueillir l'aurore sereine dans le jardin de l'existence

Où éclosent les plus beaux instants.

 

José                 08/03/2019

 

 

 

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José Pigeolet Pigeolet José - dans Métopes
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Alep
Alep
Alep
Alep

Alep,

Où le ciel effleure le désert,

Où la barque de mon imaginaire

Accoste les souffles d'Orient.

Le panorama est si beau

Qu'il engendre mélangés,

La mélancolie et le sourire.

Elle a cherché à surpasser en durée les jours et les années,

Mais, depuis 2011

Les années courent,

Les saisons sont toutes pareilles

Et les jours se succèdent dans l'horreur et la barbarie,

Sous le gris de la poussière, soulevée par les bombes

Qui sèment la mort et l'abomination.

Le feu meurtrier pleut sur Alep,

L'horreur est au quotidien.

Tragédie effroyable.

Alep
Alep
Alep

Les pleurs étouffés, les cris de désespoir,

Ponctuent l'écroulement des immeubles.

Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep

Le feu et le sang se mélangent dans un horrible bouillon.

Le chlore mange les poumons des enfants

Qui meurent au milieu de leurs jeux.

La sève de la vie s'écoule des plaies béantes

Génocide ignoble, massacre qui suscite l'horreur.

Une ville martyre devenue champ de ruines

Sous lesquelles s'accumulent les deuils.

Devant ces images impitoyables

Le ciel verse des larmes de sang.

Et les cris lancinants des suppliciés

Déchirent le poids du silence.

Peut-on supporter l'insupportable?

Qui tient les orgues sadiques de la nuit ?

Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep

Regarde mes yeux d'enfant,

Que t'ai-je fait pour que tu assassines mes parents,

Mes frères et mes sœurs innocents,

Maintenant, près des ruines de ma demeure,

Enveloppés d'un linceul blanc ?

Ta folie meurtrière massacre le soleil d'antan

 

 

                 

                      Et tue pour toujours mes rêves et mes espoirs  d'adolescent.

Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep
Alep

Vous êtes des prédateurs

Et vous aimez l'odeur du sang.

 

Déshumanisation, cruauté absolue, injures faites à l'homme.

Qui êtes-vous pour faire couler le sang des bébés ?

Abjects assassins!

Je ne peux rester sans voix devant tant de cruauté,

Pour garder un pouvoir trempé dans un baquet de sang.

Garder le silence  serait complicité.

Je veux fustiger le visage de cette férocité

Et le meurtre de l'innocence.

Révolte,

Cœur brisé.

Crier devant l'hypocrisie et la duplicité.

Il se prend pour un sultan, il se couronne en tsar.

Bachar el-Assad et Poutine se régalent

Des gesticulations de l'assemblée des nations.

Le peut-être prochain Président de la France,

Catholique ardent,

Affiche son amitié pour ce despote russe.

Douce France… pauvre France !

 Lâcheté infinie.

 

Je ne peux m'empêcher

De hurler ma colère

Contre ces tyrans

Insensibles à la détresse humaine,

Contre l'impuissance du peuple des nations,

Contre mon impuissance.

 

Tristesse infinie.

 

Demain,                                               

Peut-on croire à un avenir meilleur

Où la lumière jaillira en espoir de paix,

Le temps où bourgeonnent les roses ?

Un poétique espoir ?

 

Peu importe le vent

L'oiseau choisit la route de la liberté.

Que le soleil disperse le gris poussiéreux

Et éclaire l'amour, la douceur

Et le sourire de paix des enfants.

L'horizon sombre soulevé au-dessus du bleu

Par toutes les mains serrées.

 

 

 

Alep
Alep
Alep
Alep

Mais comment oubliera-t-on cette page noircie de douleur

Et l'odeur du sang

Dans mon cœur éclaté ?

                                                             José, le 23 novembre 2016

 

 

 

 

 

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José Pigeolet Pigeolet José - dans Métopes
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La vie devant nous s'avive

Depuis le petit chemin

Où nos âmes se sont rencontrées

C'est un amour qui naît en silence

Ourler par le battement de nos cœurs

Dans l'insouciance de l'adolescence.

Nos cœurs et nos corps s'embarquent

Sur le frêle esquif du destin.

Notre pirogue défie les rapides

En s'élançant dans la magie subtile

De la rivière de l'amour.

Emportés par le courant,

Nous voyons défiler des paysages merveilleux

Qui nous font oublier

Les traîtres remous et les rochers affleurants.

Enfin, par une belle journée de juillet

Le chant de la rivière déroule son cantique

Dans la cathédrale de nos sentiments.

Le soleil brille et réveille la terre amoureuse.

Dans un doux silence,

Réveillé par les chants de l'aube,

Sur les berges de notre amour

Nous cueillions avec tendresse

Les deux fleurs rares de notre vie.

Nous
Nous

Le temps nous emporte

Dans les rires et les larmes

Qui soudent nos cœurs.

Mais à jamais, dans nos secrets partagés

Restera la lumière de la brume

Sur nos baisers volés.

Nous

Le temps s'effiloche sans compter

Mais, sur la pointe de l'horizon,

Résonnent encore les violons de la vie.

Puissent-ils encore jouer longtemps.

Et écrire un jour sur un joli nuage

Le fil de notre amour.

Nous
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José Pigeolet Pigeolet José - dans Métopes
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MAveuglément soumise à la pensée unique, la croissance pour le profit d'un petit nombre, les hommes pillent et saccagent notre environnement.

A cette violence économique, l'utopie individualiste de l'artiste n'a d'autres choix que de s'opposer à la dépersonnalisation engendrée par la brutalité du monde d'aujourd'hui.

Mes représentations ne veulent pas stigmatiser l'attitude contemporaine, mais la déconnecter de la possession des choses et la faire osciller entre le rêve et la réalité.

Ce trajet initiatique invite à transcender la médiocrité de notre égoïsme. Quand le regard se pose sur la surface des êtres ou des objets, on ne retient que quelques reflets qui s'inscrivent dans notre mémoire. Les superpositions de ces différents reflets nous restituent une forme de réalité, sblimée et purifiée par la recréation.

C'est ce que je souhaite que vous retrouviez dans mes tableaux

Bleu
Bleu
Bleu
Bleu
Bleu
Bleu
Bleu
Bleu
Bleu
Bleu
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José Pigeolet Pigeolet José - dans métopes
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Kandisky décrit le choc qu'il reçu en découvrant les meules de Monet:

"Jusque là, je ne connaissais que l'art naturaliste…et soudain je me trouvais, pour la première fois, devant une peinture qui représentait une meule de foin, ainsi que l'indiquait le catalogue, et que je ne reconnaissait pas… L'objet employé dans l'œuvre, en tant qu'élément indispensable, perdit pour moi son importance. Tout cela restait confus en moi et je ne pouvais encore prévoir les conséquences naturelles de cette découverte".

Ecrit sur l'art

A partir de là plusieurs questions se posent:

Pourquoi garder fidèlement, dans nos représentations, l'apparence de la nature qui se

présente à nos yeux ?

Quel intérêt aurions-nous à reproduire photographiquement le monde qui nous entoure ?

L'artiste est-il réduit à copier scrupuleusement la "réalité" …et quelle réalité ? Celle de la première apparence de l'œuf ou sa réalité cachée qui se révèle lorsque la coquille se brise ?

Alors, pourquoi ne pas partir de la réalité apparente, de la briser et explorer librement les formes qu'elle suggère.

Analyser, décomposer, superposer, assembler les éléments proposés par l'appréhension première, plus uniquement selon les critères de la perception mais aussi par ceux de la composition du tableau et de sa révélation.

La tradition Greco-latine s'était efforcée de distinguer l'homme de la confusion de l'univers. La sensibilité alliée à la raison lui avait permis de prendre un certain recul par rapport à ce dernier afin de lui permettre d'organiser son existence et sa pensée tout en domptant ses peurs et ses angoisses.

Ecrit sur l'art

Le monde d'aujourd'hui, plein d'agressivité contre le vivant semble, à nouveau nous échapper. Tous les efforts conjugués du réel des sens et de l'ordre de la raison accumulés au cours de la tradition ont été jetés comme de vulgaires déchets.

Tendu frénétiquement vers le progrès, nous n'avons pas hésité à négliger tout contrôle de la conscience dans notre volonté d'asservir l'univers. Il en résulte que, comme nos ancêtres, nous nous retrouvons démunis mentalement et physiquement.

Les monstres d'aujourd'hui ne sont plus les bêtes féroces ou les divinités maléfiques mais s'appellent pollution, déforestation, profits aveugles, croissance à tout prix, Monsantos, CO2, dioxine, agent orange, OGM, HIV, terrorisme, Scientologie, misère ou asservissement physique et morale...des dragons bien plus dangereux que ceux du moyen âge car insaisissables, avançant sous le couvert du progrès. Insidieusement, petit à petit, ils se sont infiltrés partout: dans la terre qui nous nourrit, dans l'air que l'on respire, pour finalement squatter à notre insu notre esprit et notre corps.

Aujourd'hui, nous nous sentons envahir par l'angoisse de l'humanité confrontée à son destin qu'elle ne peut plus maîtriser car, lancée dans une course folle et absurde, elle a piétiné les repères qui lui donnaient une certaine emprise sur le chaos du monde. Nous sommes à nouveau des primitifs devant un monde devenu étranger, peuplé d'esprits redoutables qui tantôt nous terrorisent et plus tard nous apprivoisent pour mieux nous asservir.

Ecrit sur l'art

Alors, l'artiste réagit en expulsant de son âme sa perception du monde. Les lignes qu'il trace et les couleurs qu'il projette sont l'émanation inconsciente de sa vie affective autour de laquelle il défend son existence et sa pensée.

Pour ce faire, il détruit les images pour mieux puiser dans la vie et en transmettre ses palpitations primordiales en la réédifiant par de savantes constructions basées sur des structures primaires douces ou brutales et des plans colorés.

Il propose la rigueur de l'harmonie, partant à la recherche de la beauté idéalisée ou en dénonçant par le déchiquetage des formes la tragédie de notre destin.

Telle est sa quête. Telle est la logique secrète qui l'anime.

André BRETON disait :

"L'a-t-on assez gagné, cet angle toujours fuyant sous lequel les choses s'estompent jusqu'à disparaître au prix de quoi commence seulement à se dévoiler l'esprit des choses".

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José Pigeolet Pigeolet José - dans Métopes
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22 mars 1916

 

Envie de voyage au-delà des mers.

Valises embarquées, étreinte affectueuse.

Baisé amour, baisé volé, baisé adieu.

Monotonie du travail ordinaire.

Joyeuse innocence et insouciance de l'enfant,

Les yeux remplis de rires éclatants.

 

Vacarme assourdissant,

Éclatement de la chair.

Artères explosées.

C'est l'amalgame du sang, du fer et du verre

Dans un effroyable enlacement.

 

Quelques secondes d'un étrange silence.

C'est la sidération.

La poussière et l'odeur de la poudre sectionnent la respiration.

Alors, hurlent la douleur et la peur.

Et puis, c'est la fuite éperdue de ceux qui sont encore debout.

Ils abandonnent leur valise et leur rêve d'un soleil débordant,

Ils enjambent les gravats et les corps mutilés

 

Dans cette rame éventrée, dans ce hall ensanglanté

Le quotidien devient fiction, la réalité est abomination.

 

Les brûlures défigurent,

Des corps sans tête gisent.

Des membres sont perdus dans l'éclatement de l'espace,

Le sang écumé se noircit par les flammes.

On appelle à l'aide,

D'autres portent secour, les mains se maculent de sang.

 

Au loin, des sirènes hurlent

Le tunnel frémit de lumières falotes,

Pleure l'effroi d'un enfant dans les bras d'un vivant

Qui marche, silhouette noire sur le ballast branlant.

 

Bruxelles, fracassée par la barbarie

Atterrée comme une veuve reniée,

Le corps frêle courbé par le souffle de la haine.

Déchirures extrêmes, le cœur est en deuil.

Rivière de pleurs dans les yeux meurtris.

L'âme remplie d'une tristesse indicible.

La pureté du blanc taché de sang.

Le coran détourné par les imposteurs.

Rue de la haine et de l'envie la mort ennemie est venue

Accompagnée du chant strident des sirènes.

 

Je regarde les images de ce carnage.

Les vagues de la rage noient ma tolérance

Envers ceux qui pratiquent ces actes innommables,

Au nom d'un prophète qui ne les adoube pas au martyr de la foi.

Pourquoi cette cruauté aveugle et sanguinaire?

Pourquoi ces actions abjectes ?

Pourquoi ces blessés et ces morts,

Engendrés par tant de barbarie arbitraire ?

Toutes ces familles endeuillées!

 

Puits noir est ma pensée dans laquelle je me noie.

Des réponses ne suffiront pas à éloigner

Cette indicible sensation

De ces morts inattendus.

Sanglots étouffés en sillon se déversent

Et renaissent en parterre de fleurs et lumignons,

Si fragiles au vent de la vengeance.

 

Comment supprimer la haine et les larmes de sang ?

 

Un rai de lumière lave mon cœur

Et allume le désir de la sérénité.

Transcender la folie meurtrière en sublime beauté.

L'aurore au soleil espéré ôte le froid de la mort

Et éloigne les ailes des déchirures extrêmes.

Vers la fontaine de l'amour, vole la colombe.

Elle y lave sa robe blanche tachée de sang.

Dans les cœurs en souffrance germent les racines du pardon.

Les pâlottes lumières dans le tunnel sombre

Ne tarderont pas à rivaliser le soleil.

L'amour de la vie, de la paix fraternelle finit par triompher.

L'espoir poétique du sourire cristallin de l'enfant

Chasse le noir horizon effaré.

Apparaît l'espérance dans le ciel gorgé d'étoiles scintillantes.

 

Le jasmin refleurit.

 

Salah, Khalid, Ibrahim et les autres…

Je déteste ce que vous êtes devenus.

Vous étiez des enfants,

On vous a aimé, vous avez aimé, vous avez ri et chanté.

Votre corps est fait de chair et de sang comme le nôtre.

Et pourtant!

​Salah, Khalid, Ibrahim et les autres…

Je vous aime pour la promesse de votre enfance

Et pour ce que vous auriez pu devenir.

Au fond de votre âme subsistera toujours

Une étincelle d'humanité.

À vous et à moi de la refaire grandir

Pour qu'elle embrase votre cœur.

 

                                                               José             26/03/2016

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Voeux 2016
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Le crabe
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  • : Le blog de José Pigeolet
  • : Peindre avec les mots ou écrire avec la couleur; la peinture et l'écriture créent des atmosphères qui jettent sur le monde qui nous entoure un regard révélateur de ce que nous sommes et ce vers quoi nous allons. Peindre ou écrire sont des actions qui commencent par la même angoisse du blanc sur la toile ou la page. Expulser les images que l'on a en soi, dans la joie ou la douleur, mais toujours dans le doute. Les jeter sur un support aide à mieux comprendre ce que l'on est par la vérité qui se révèle dans le regard des autres dans leur contact avec les œuvres. C'est l'ouverture de la route sur la quête de son identité. Réflexions colorées ou écrites, vous en trouverez quelques-unes sur mon Blog. À vous de les interpréter et peut-être de rejoindre une part de vous-même dans ce lieu "imaginaire".
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